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Les 2 infinis
26 février 2017

Eveil et quotidien

M : Vous venez d’employer le terme « s’éveiller ». C’est d’ailleurs la traduction littérale de buddha - l’éveillé, et non pas l’illuminé.

S : Oui, c’est ça. S’éveiller est également pour moi une expression adéquate. Car dans une telle expérience, c’est comme quand on se réveille après un rêve. Tout à coup, on voit la réalité. Ce qui est spécial dans ce vécu, ce n’est pas que l’on fasse l’expérience de quelque chose de plus clair, ou plus beau, ou plus grand que ce que l’on a vu et entendu jusqu’alors. Cela signifie que l’on perçoit autrement la réalité, qui est comme elle a toujours été. On fait l’expérience, par exemple, qu’un merle est posé sur une branche. C’est cela que l’on peut vivre dans l’illumination. Et tout à coup, on est tellement saisi par ce tableau assez quotidien, que l’on ne peut pas du tout le décrire avec les termes et qualificatifs habituels à notre disposition jusque-là. Ce que l’on pourrait dire, c’est que l’on a enfin vu le véritable merle, le merle. Comme si l’on n’avait encore jamais vu un merle jusque-là, alors qu’on a vu déjà beaucoup de merles. On pourrait dire aussi – après coup – que l’on a enfin fait l’expérience de soi-même; bien que l’on vienne de voir un merle. Comme s’il n’y avait pas de séparation entre celui qui regarde et ce que le regard est en train de rencontrer. Comme s’il n’y avait pas de séparation entre moi et le merle ; comme si je me reconnaissais moi-même dans ce merle sur la branche. Comme si j’étais assise depuis toujours sur cette branche, tout en sachant en même temps et pertinemment que je suis assise sur ce muret et que je regarde la branche là-bas, avec le merle. Mais, d’une manière difficilement explicable, mon « être-assise-sur-le-muret » est tout à fait le même que le merle sur la branche. Et si par hasard, le son d’un moteur venant de la rue me parvenait dans un tel moment, ce son ne serait également rien d’autre que le merle sur la branche. Et si alors on tourne la tête et que le regard rencontre un tournesol ou l’encadrement d’une porte, on voit à nouveau cela, qui s’était montré en tant que merle sur la branche. Pour autant, on ne confondra pas un tournesol ou l’encadrement de la porte avec un merle. On n’a pas de trouble de perception de la réalité. On est tout à fait éveillé à la réalité. On voit à nouveau ou encore – toujours encore on voit ce Un. Comme si ici cela était un merle et là un tournesol et maintenant l’encadrement de la porte puis le bord de la table. Et en même temps, on sait que cela c’est moi. Pour moi, c’est comme si je me voyais moi-même, encore et encore, toujours et toujours, toujours encore comme dans un miroir : seulement moi. Comme si j’étais un avec tout ce qui est et qui était, un dans une seule et unique présence, qui elle n’est pas palpable mais qui emplit tout, temps et espace, de sa pure présence. Tout est en ordre, aussi naïf que cela puisse paraître, tout va bien. C’est une ébauche possible de l’éveil. Si quelqu’un a déjà été, ne serait-ce que très légèrement, touché par un tel vécu, cette description ne lui semblera pas être une pure absurdité mais quelque chose résonnera en lui et lui rappellera comment cette réalité peut se montrer.


Silvia Ostertag (Eveil et quotidien)
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