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Les 2 infinis
sagesse
26 septembre 2012

La maladie de penser sans cesse

 

Samoa

« Quand le mot esprit vient dans la bouche du Papalagui, ses yeux s’agrandissent, s’arrondissent et deviennent fixes, il soulève sa poitrine, respire profondément et se dresse comme un guerrier qui a battu son ennemi, car l’esprit est quelque chose dont il est particulièrement fier. Il n’est pas question là du grand et puissant Esprit que le missionnaire appelle Dieu, et dont nous ne sommes qu’une image chétive, mais du petit esprit qui est au service de l’homme et produit ses pensées.
Quand d’ici je regarde le manguier derrière l’église de la mission, ce n’est pas de l’esprit, parce que je ne fais que regarder. Mais dès que je me rends compte que le manguier dépasse l’église, c’est de l’esprit. Donc il ne faut pas seulement regarder, mais aussi réfléchir sur ce que l’on voit. Ce savoir, le Papalagui l’applique du lever au coucher du soleil. Son esprit est toujours comme un tube à feu chargé ou comme une canne à pêche prête au lancer. Il a de la compassion pour nous, peuple des nombreuses îles, qui ne pratiquons pas ce savoir-réfléchir-sur-tout. D’après lui, nous serions pauvres d’esprit et bêtes comme les animaux des contrées désertiques.

C’est vrai que nous exerçons peu le savoir que le Papalagui nomme penser. Mais la question se pose si est bête celui qui ne pense pas beaucoup, ou celui qui pense beaucoup trop. Le Papalagui pense constamment : "Ma hutte est plus petite que le palmier... Le palmier se plie sous l’orage... L’orage parle avec une grosse voix..." Il pense ainsi, à sa manière naturellement. Et il réfléchit aussi sur lui-même : "Je suis resté de petite taille... Mon coeur bondit de joie à la vue d’une jolie fille... J’aime beaucoup partir en mélaga [voyage]..." Et ainsi de suite... C’est bon et joyeux, et peut même présenter un intérêt insoupçonné pour celui qui aime ce jeu dans sa tête. Cependant, le Papalagui pense tant que penser lui est devenu une habitude, une nécessité et même une obligation. Il faut qu’il pense sans arrêt. Il parvient difficilement à ne pas penser, en laissant vivre son corps. Il ne vit souvent qu’avec sa tête, pendant que tous ses sens reposent dans un sommeil profond, bien qu’il marche, parle, mange et rie. 

Les pensées qui sont le fruit du penser, le retiennent prisonnier. Il a une sorte d’ivresse de ses propres pensées. Quand le soleil brille, il pense aussitôt : ”Comme il fait beau maintenant!” Et il ne s’arrête pas de penser : ”Qu’il fait beau maintenant!” C’est faux. Fondamentalement faux. Fou. Parce qu’il vaut mieux ne pas penser du tout quand le soleil brille. Un Samoan intelligent étend ses membres sous la chaude lumière et ne pense à rien. Il ne prend pas seulement le soleil avec sa tête, mais aussi avec les mains, les pieds, les cuisses, le ventre et tous les membres. Il laisse sa peau et ses membres penser pour lui. Et ils pensent certainement aussi, même si c’est d’une autre façon que la tête. Mais pour le Papalagui l’habitude de penser est souvent sur le chemin comme un gros bloc de lave dont il ne peut se débarrasser. Il pense à des choses gaies, mais n’en rit pas, à des choses tristes, mais n’en pleure pas. Il a faim, mais ne prend pas de taro ni de palousami. C’est un homme dont les sens vivent en conflit avec l’esprit, un homme divisé en deux parties. La vie du Papalagui est comparable à un homme qui part en pirogue à Savaii et pense, à peine éloigné de la rive : "Combien de temps me faudra-t-il pour arriver à Savaii?" Il pense, mais ne voit pas le paysage charmant dans lequel se déroule son voyage. Bientôt sur la rive gauche se présente un flanc de montagne. Son oeil l'a à peine capté qu'il ne peut le lâcher : "Que peut-il y avoir derrière la montagne? Une baie étroite ou profonde?" Avec de telles pensées il oublie de chanter en compagnie des jeunes le chant des rameurs. Il n'entend pas non plus le joyeux badinage de la jeune fille. La baie et la montagne à peine dépassées, une nouvelle pensée le tracasse : "Et si l'orage venait avant le soir?" Dans le ciel clair il cherche des nuages sombres, en continuant à penser à l'orage qui pourrait bien venir. L'orage ne vient pas, et le soir, il atteint Savaii sans encombre. Pourtant c'est comme s'il n'avait pas voyagé, car ses pensées étaient toujours loin de son corps et hors du bateau. Il aurait aussi bien pu rester dans sa hutte d'Upolu.
[...] Est-ce que nous devons, mes chers frères non pensants, après tout ce que je vous ai fidèlement rapporté, être vraiment les disciples du Papalagui et apprendre à penser comme lui ? Je dis : "Non!". Car nous ne devons rien faire de ce qui ne rend pas notre corps fort et nos sens meilleurs et plus heureux. Il faut nous garder de tout ce qui voudrait nous voler la joie de vivre, de tout ce qui assombrit notre esprit et lui prend sa lumière limpide, de tout ce qui met notre tête en conflit avec notre corps. Le Papalagui nous prouve lui-même que penser est une grave maladie qui diminue de beaucoup la valeur de l'être humain. »

Extrait de "Le Papalagui, les paroles de Touiavii, chef de la tribu de Tiavéa dans les îles Samoa" recueilli par Erich Scheurmann

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2 septembre 2012

L'université des va-nu-pied

31 août 2012

TOUT ARRIVE POUR LE MIEUX

Vous devez vous rappeler que tout ce qui arrive, arrive pour le mieux. Il y a une distribution divine des choses. Votre vie eût été appauvrie sans toutes les choses qui vous sont arrivées. Aussi tout doit être accepté, le bon et le mauvais. En fait, vous n'avez pas le choix. Si vous voulez le bon, vous aurez le mauvais aussi. Chaque chose a deux aspects. Si vous voulez le côté face d'une pièce, vous devez prendre le côté pile aussi. C'est inutile d'attendre seulement du plaisir. Le plaisir et la peine vont toujours de pair. Il faut prendre les deux, ou rien du tout. Quand une chose arrive, acceptez-la d'abord. C'est la vérité. C'est arrivé. Pouvez-vous la refuser et dire que ce n'est pas arrivé? Non. Après avoir pleuré et vous être lamenté vous allez accepter en tout état de cause. Pourquoi ne pas l'accepter dès le début ? Dites " oui " à tout. Quand vous acceptez de plein gré une chose, il n'y a pas de souffrance.
La peur doit être bannie de votre vie.
La peur que quelque chose arrive est pire que la chose elle-même. Les peureux meurent bien des fois avant l'heure de leur mort. La peur doit être bannie de votre vie car elle est irrationnelle et bloque l'action.

Swami Prajnanpad

5 août 2012

La Transformation de la Conscience, par Eckhart Tolle

(...)

Qu’est ce que vous vous demandez quand les gens vous demandent qui êtes-vous ? L’identité qu’ils vous donnent avec une grande conviction, «  je suis John Smith », ne peut pas être mise en doute. Puis ils vous raconteront ce qu’ils font pour gagner leur vie. Et s’ils ont suffisamment de temps, ils vous raconteront une courte ou longue histoire. Et ceci est l’histoire de « moi ». Puis la personne vous parlera aussi des rôles qu’il ou elle joue dans le monde, convaincue de ce qu’il ou elle est : « je suis mère de trois enfants, je suis comptable, je suis au chômage, j’ai réussi dans la vie ». Sa petite identité conceptuelle, les idées qu’il ou elle a dans la tête.

Bien sur nous avons tous un rôle à jouer dans la vie, mais de croire que nous sommes que cela, s’y être identifié, constitue une terrible prison, un esclavage. Vous pouvez remplir ce rôle sans croire que c’est ce que vous êtes. Vous pouvez remplir votre rôle de mère, sans que cette idée occupe entièrement votre esprit. Autrement, vous serez une mère pour le restant de vos jours et vos enfants resteront des enfants pour vous. Vous penserez avoir toujours raison et vous leur dicterez leur conduite. Vous serez emprisonné dans ce rôle. Le monde est rempli de gens piégés dans le rôle que la société leur a attribué, leurs rôles conditionnés, qui sont des structures mentales. Un rôle n’étant rien d’autre que certaine forme mentale. Des conceptions de l’esprit, des pensées. Donc c’est un autre aspect de l’identification au contenu du mental.

Et ce sens de l’identité personnelle « moi », qui est issu de l’identification au contenu du mental, n’est jamais à l’aise, ni accompli pendant bien longtemps. Pas pour longtemps. Ce moi vit dans un état de « pas assez ». Un autre sentiment accompagne cet état «  je ne suis pas encore complet, je n’ai pas encore réussi, j’ai besoin d’être chez moi, j’ai besoin de plus de grandir dans le sentiment d’être moi-même ». Et chez beaucoup de gens, l’histoire du moi semble avoir été un accomplissement, même si ce n’est qu’en surface. Et notre culture nous dit souvent que les gens célèbres ont réussi, en apparence, et cela vous donne l’illusion de pouvoir parvenir à l’accomplissement du sens du soi, fondé sur une histoire. Ce serait la fin heureuse. Si vous rencontrez des célébrités ou des gens riches, vous vous rendrez compte qu’ils sont dans le même état d’esprit que n’importe qui. Ils n’ont pas l’impression d’être accomplis, ils ressentent la peur, un mécontentement et un sentiment de manque alors qu’ils ont tout. Ce que je vous dis ressemble à de mauvaises nouvelles, comme si vous n’aviez pas la moindre chance de réussir en cette vie ci.

Maintenant, si il vous reste assez de temps, ce sens du soi aura l’impression qu’il vous reste suffisamment de temps pour vous réaliser, « j’ai encore 40 ou 50 ans devant moi », et c’est probablement suffisant pour compléter l’histoire de « moi ». Et faire en sorte qu’elle se termine bien. Donc on ne se rend pas compte que ce mécontentement, ce malheur, ce moi problématique qu’on connaît en direct, ne sont pas un problème personnel, mais une construction inhérente à la structure du mental. C’est un dysfonctionnement structurel et non un dysfonctionnement basé sur le contenu du mental.

Et chaque sens du moi, avec sa propre histoire, sait que cette histoire n’a pas tout à fait tourné de la manière dont elle aurait du. Les choses ne se sont pas déroulées de la façon dont elles étaient censées se dérouler. Et donc vous commencez à croire que vous pouvez vous accomplir avec le temps. Mais à mesure que vous avancez en âge, vous vous rendez compte que l’accomplissement ne se produit toujours pas. Et que l’avenir se rétrécit.

Que font alors beaucoup de personnes âgées, face à ce rétrécissement de leur avenir ? Elles se tournent de plus en plus vers le passé. Au moins je peux me raccrocher à cela. Elles l'entretiennent en y pensant et en en parlant. Si leur identité fabriquée par le mental est de nature malheureuse et se fonde sur la plainte, car la vie les a tant maltraitées et a été injuste envers elles, très bien, c’est mieux que pas d’identité du tout. Et mieux vaut faire en sorte que cela continue.

(...)

Donc si vous avez assez de temps, vous vous mettez en quête du plus qui comblerait le moi, une maison plus grande pour vous sentir plus en sécurité, quelque chose d’un peu plus important, une plus grosse voiture devrait faire la différence. Elle est plus grosse que celle des autres. Cette voiture devient alors une forme pensée. Ce n’est pas la voiture elle-même qui importe, car ce n’est que du métal, et dans quelques années ce sera un tas de rouille. Ce qui importe, c’est la forme pensée « voiture » qui contient le « moi ». Ce moi est la forme pensée qui s’identifie à la forme pensée « voiture ». Moi, voiture, c’est ce qui se passe. De plus s’il s’agit d’une grosse voiture, le moi, l’illusion du moi s’agrandit à travers cette forme pensée. Pour quelque temps.

Mais peu après, cela ne satisfait plus vraiment le sens du soi, et il vous faut partir en quête d’une nouvelle chose, c’est vers ce plus que vous courrez continuellement afin de parachever le moi. C’est un besoin psychologique qui lui est inhérent. Tout le monde compte sur le moment suivant, le futur, car cela donne l’impression de pouvoir obtenir ce dont on a besoin pour compléter ce « moi ». Et à ce moment là leur vient l’idée d’une maison, d’une maison plus grande que la voiture. Alors surgit à nouveau la forme pensée du moi qui devient la forme pensée de ma maison, ma, mon. Ma, c’est une histoire triste et intéressante de dire « ma » ou « mon », la mienne ». Les enfants apprennent cela très tôt. C’est une de la première chose qu’ils apprennent. Cela marque le commencement du moi, du moi égocentrique, cela est à moi.

Et donc cela constitue une idée qui se développe et la civilisation entière se focalise sur l’idée de posséder quelque chose, l’idée de propriété. Si vous examinez cela clairement, vous voyez que le fait de dire « je suis propriétaire de ceci, de cette table, de quoi d’autre que ce soit, de cette maison, de cette voiture dont on dit c’est la mienne »… Mais qu’est ce que cela veut dire ? C’est une histoire que vous êtes en train de vous raconter à ce sujet, une histoire qui devient une forme pensée. Supposons que vous soyez fou, vous compteriez peut-être cette histoire « je possède ce grand immeuble de bureaux de 20 étages ». Vous passez chaque jour devant en vous disant « c’est à moi ». Il est maintenant tout à fait possible que le reste de la société soit d’accord avec votre histoire et vous donne un morceau de papier pour reconnaître votre accord. Par contre, si vous croyez que vous possédez quelque chose, et que personne n’est d’accord avec vous, on vous prendra pour un fou. Mais si les gens sont d’accord, ils vous considéreront comme quelqu’un de riche. Cette richesse est importante car elle rend votre histoire plus imposante. Jusqu’à ce quelle redevienne triste. Ceci pour vous montrer quelle importance prennent les concepts dans votre vie. Ces concepts amènent les gens à vivre dans un sens de l’être conceptualisé, rien que des concepts mentaux.

Dès que vous vous installez dans ce moi conceptualisé, vous vivez aussi dans une réalité conceptualisée, car vous percevez toute cette réalité à travers un être fabriqué par le mental « le moi ». Et c’est ce qui donne cette compulsion à interpréter immédiatement et à cataloguer chaque expérience, chaque perception. Et ceux qui sont très habiles à cela, ceux qui savent rapidement cataloguer, analyser les choses, enregistrer l’information, la restituer, dissèquent les choses en tout petits segments, afin de les examiner, ou ceux qui s’y connaissent en concepts, on les qualifie d’intelligents. Et si vous êtes très doué pour disséquer de petits éléments de connaissance en encore de plus petits fragments, alors vous obtenez un doctorat. Si vous êtes allé à l’université, vous savez combien sont minuscules les fragments sur lesquels les gens effectuent leurs recherches.

Et c’est cela la condition humaine. Et ce besoin du plus n’est pas seulement un besoin personnel, car ce sentiment de soi devient un sentiment collectif de soi, par l’intermédiaire des entreprises, des sociétés commerciales, des nations, des tribus, des organisations. Celles-ci sont toutes créées par ce moi conceptuel dont elles sont l’expression, une expression collective de cela. C’est facile à voir quand on considère une immense société commerciale et son aptitude à croître. Regardez par exemple l’effondrement récent d’Enron Corporation aux Etats-Unis : gigantesque ! Et vous vous apercevez que la société entière était dominée par le besoin avide de « toujours plus ». Et donc c’est facile de dire « regardez comme cette entreprise est corrompue ». En fait elle n’est qu’un ego à grande échelle.

Et le soi, cette entité, ne se préoccupe donc au fil de sa vie, que de deux choses importantes : la première, c’est le mouvement du désir, celui de vouloir plus, et la deuxième un mouvement de protection, « je ne veux rien perdre du peu que j’ai déjà ». Ces deux mouvements sont « Vouloir » et « Avoir peur ». Désir, peur. Les êtres humains évoluent entre les deux. L’origine des actions entreprises par le soi égocentrique est soit le désir avec le besoin d’avoir plus, soit la peur avec le besoin de protéger le moi.

Chaque être humain est dans cet état d’esprit, son petit soi à la recherche de ce que je peux obtenir. Ou encore, cette personne représente-elle une menace pour moi ? Donc l’esprit humain regarde chaque personne qu’il rencontre avec les yeux de la peur et du désir. Et c’est comme cela que vivent les humains. Mais autre chose vient aggraver la situation aussi fabriquée par le mental. C’est d’avoir des frontières clairement délimitées et qui ne sont que pensées bien sur. Des frontières entre moi et le reste du monde y compris les autres. Et avec cela vient le besoin toujours inconscient pour ce sens du moi, de se définir plus fortement par l’opposition. Le petit soi a besoin d’ennemis quelque part, car sans eux, le sentiment d’identité ne serait plus assez solide, et deviendrait changeant.

Vous pouvez voir cela sur le plan collectif en observant comment les religions, les nations, les différentes églises et les tribus, aiment toutes leurs ennemis. Elles les aiment, non pas dans le sens que Jésus leur a enseigné, mais afin de définir et de renforcer leurs sentiments d’identité. Les chrétiens ont fait cela pendant longtemps, et certains le font encore. Les musulmans le font beaucoup ces temps ci. Définir son identité à travers le fait d’avoir un ennemi, n’est pas spécifique à une religion, n’importe quelle religion s’y prête, les nations le font aussi. Qui seriez-vous sans un ennemi qui renforce tant le soi illusoire ? Et sur le plan personnel, cela signifie que vous avez besoin de problèmes. Une fois encore c’est inconscient, et cela fait parti intégrante du mental. Nous connaissons tous des gens qui sont attachés à leurs problèmes, car c’est toujours plus facile de le voir chez les autres que chez soi ! Donc l’identité de tant de gens, fondée avant tout sur une histoire, est basée sur une accumulation de problèmes et de conflits dans leur vie. Et quand vous leur demandez des nouvelles, ils vous racontent leurs problèmes. Si c’est cela la condition humaine, sur le plan personnel ou collectif, nous pouvons donc comprendre pourquoi l’histoire des êtres humains paraît si démente, folle. Lisez l’histoire du vingtième siècle, c’est un cauchemar. Et si vous regardez les nouvelles à la télévision ce soir, cela continue! Donc le monde que les êtres humains ont créé est une expression, une manifestation de leur état de conscience, ou plutôt de leur état d’inconscience.

Nous voyons maintenant pourquoi l’histoire est ce qu’elle est, et ce depuis que l’homme a commencé à la consigner. Il y a un élément de dysfonctionnement ou de folie très fort dans le psychisme humain. Et tous les grands maîtres ont vu cela, le Bouddha, Jésus, les sages de l’Inde, tous ont observé ce dysfonctionnement énorme de la condition humaine. Le Bouddha l’a appelé souffrance, en disant que la condition humaine est un état de souffrance. Jésus l’a appelé « Péché ». Bien sur ce mot a été souvent mal interprété. En Inde, ils appellent cela illusion. Tous ont observé cela et ils ont vu aussi qu’il y avait un moyen d’en sortir.

Un état de conscience différent est possible pour l’humanité. Le Bouddha l’appelle « la fin de la souffrance ». Jésus l’appelle « le salut ou le royaume des cieux ». Dans les enseignements de l’Inde, on appelle cela « libération ou illumination ». Enfin et bonne nouvelle… mais vous avez peut-être remarqué que de voir la condition humaine, telle qu’elle est déjà libérateur. Et c’est nécessaire, car s'il n’y a aucun changement dans l’état de conscience de l’homme, la planète et l’humanité ne survivront probablement pas plus de cent ans. Car se dysfonctionnement est maintenant amplifié par les moyens scientifiques et la technologie.

Pour la première fois, l’humanité se trouve confronté à la possibilité de provoquer sa propre extinction. Et c’est pourquoi aujourd’hui, un nouvel état de conscience doit émerger chez les être humains. Et c’est du fait de cette situation, qu’un nouvel état de conscience est en train d’apparaître. Maintenant que je suis en train d’ajouter une nouvelle idée à votre esprit, ce n’est pas ce que je veux faire. Certains d’entre vous me demanderont peut-être : comment savez-vous qu’un véritable changement est en train de se produire ? Comment savez-vous cela ? Cette réunion, ici même, fait partie de cette transformation de la conscience humaine.

Nous arrivons donc maintenant au coeur du sujet : la possibilité d’une transformation de la conscience, celle qui est en train de se produire ici. Pourquoi ? Comment ? Comment nous sortir de milliers d’années de conditionnements ? Et le petit soi de dire « Oh mais c’est très intéressant », « Oh oui ; je veux me transformer » Et il ajoute : « dites m’en plus, expliquez moi comment faire ? Comment puis-je y parvenir ? ». En d’autres termes, une nouvelle image prend forme mentalement, celle de moi parvenant à un état de conscience, un idéal. Donc la grosse voiture n’a pas marché, la grande maison non plus, une position plus élevée dans la société n’a pas suffit à combler le moi, trois mariages n’y sont pas parvenu, ni des expériences, ni des voyages, ni un doctorat. Mais à présent il y a la possibilité d’ajouter au moi l’accomplissement ultime. Et c’est alors que vous devenez un chercheur spirituel ! Et vous ne réalisez pas que c’est avec le même état d’esprit, le même besoin de plus et d’un avenir pour compléter le moi, qui est encore à l’oeuvre.

Et puis après vingt ans de recherches, vous commencez à être un peu fatigué. Plusieurs fois vous avez vraiment pensé avoir trouvé. La grande expérience. Qui s’est soudainement évanouie dans le passé. Et alors vous êtes devenu quelqu’un qui, un jour, a eu une grande expérience. C’est mieux que rien. Vous pouvez en parler, y penser, vous sentir malheureux à ce sujet. Quelques années plus tard c’est devenu une habitude. Alors le soi fabriqué par le mental dit « dites moi comment y arriver, quelque soit le temps qu’il faut. D’ailleurs, donnez moi du temps et j’y arriverai ». C’est ce que vous obtenez dans certain enseignement qui vous donnent satisfaction, et qui disent « il y a 12 étapes ». Cela vous permet de savoir exactement où vous en êtes « j’en suis à la quatrième étape, et toi ? » Donc certains enseignements comportent douze étapes et seul celui qui a atteint la treizième devient le chef du groupe.

(...)

Le temps est donc quelque chose de bien étrange. Il semble que nous ne puissions pas y échapper et d’un autre côté, nous n’en avons jamais assez et il nous consume. Mais il y a encore quelque chose d’étrange : le temps, en réalité est à la fois passé et futur. C’est cela le temps. Mais le plus étrange, c’est qu’en fait vous ne vous trouvez jamais en présence ni du passé ni du futur. Jamais. Donc la chose étrange est que « maintenant » est toujours la seule chose qui soit. C’est toujours maintenant.
Ainsi, bien que cela vous paraisse étrange, il ne vous ait jamais rien arrivé. Vous n’avez jamais rien fait ou vécu quoi que ce soit dans le passé. Ce qui vous est arrivé, quoi que ce puisse être, est obligatoirement dans le présent. Et comme le futur n’arrive jamais, bien sur, quand il arrive, c’est maintenant ! Ainsi, même quand on se rappelle du passé, le souvenir n’est qu’une trace de mémoire à laquelle nous prêtons attention « maintenant ». Ce dont on se souvient, la forme pensée, ne peut surgir que « maintenant ». Donc le souvenir doit donc se dérouler obligatoirement dans le maintenant. Vous ne pouvez jamais échapper à « maintenant ». Nous réalisons cette chose étrange qu’en réalité, il n’y a ni passé, ni futur, ni avenir dans votre vie. Le futur est ce qu’on envisage « maintenant ». Par conséquent, il n’y a pas de vie en dehors de « maintenant ». Donc, et cela peut paraître paradoxal. D’un côté le temps semble très puissant, il semble très réel et paraît nous affecter. Et pourtant si vous y regardez de plus près, il est introuvable. En regardant le temps, tout ce qu’on y trouve, c’est l’instant présent.

Alors, quelque soit les effets du temps sur le corps, si au bout du compte le temps n’est pas réel, et peut-être que le corps ne l’est pas non plus, et que tous deux sont deux aspects de la même illusion… Mais mettons ceci de côté pour l’instant.

Et réalisons que notre vie entière se passe dans cet espace du maintenant. Elle n’a jamais été en dehors du maintenant et ne sera jamais en dehors du maintenant. Chose étrange, quand les gens sont piégés dans leur identité égocentrique fabriquée par le mental, tout ce qui compte pour eux est le passé ou l’avenir. Autrement dit, ils s’intéressent à tout sauf à ce qui est réel. Et ceci leur échappe presque continuellement. Et le moment présent est au mieux une marche qui leur permet d’atteindre le moment suivant. Et très souvent j’essaye d’échapper au moment présent, je résiste, je ne l’aime pas, je suis en route pour un autre lieu bien plus important, c’est le moment suivant. C’est là que je vais découvrir ce que je suis. Nous arrivons à une petite ouverture maintenant, une ouverture qui au début paraît très petite, et qui se situe au delà du mental conditionné. Elle mène à la libération de milliers d’années de conditionnements au travers de l’accès au pouvoir qui réside caché dans le moment présent. On pourrait dire que la transformation de conscience qui s’opère ici, est de simplement découvrir une nouvelle relation avec maintenant.

Une relation nouvelle avec maintenant. J‘ai parlé plus tôt du besoin que ressent le soi fabriqué par le mental, d’avoir des problèmes et des ennemis. Et on pourrait dire que le pire ennemi de ce soi fabriqué par le mental, est le maintenant. Les gens ne réalisent pas qu’ils ont fait du maintenant un ennemi. Mais la transformation de la conscience n’est pas quelque chose qui pourrait vous arriver à un moment donné de la vie. La transformation de la conscience consiste à simplement s’aligner sur ce moment présent. Et cela, vous ne pouvez le faire que maintenant. Est-il possible de vivre de cette manière ? De telle sorte que vous accueillez ce moment, le seul qui soit à jamais, c’est toujours ce seul moment, il n’y a jamais que lui, c’est celui là, quelque soit sa forme vous l’accueillez.

Maintenant le petit moi dit « non cet instant présent ne me plait pas du tout, je veux y échapper, il ne participe pas à mon accomplissement. En fait c’est un obstacle aux buts que je voudrais atteindre, c’est un obstacle à mon histoire». C’est cela que représente le maintenant pour le moi. Et le petit moi renchérit « ce maintenant est en train de saboter ma vie, mon histoire ». Voilà pourquoi j’ai besoin d’arriver au moment suivant. Vivre ainsi en résistance continuelle au maintenant constitue le dysfonctionnement structurel. La possibilité s’offre à nous maintenant de dire oui à ce moment, parce qu’il est, parce qu’il est constamment tel qu’il est. Et vous pourrez crier, hurler, vous plaindre, il restera tel qu’il est. Et le petit soi de dire « oui mais, je voudrais améliorer la condition du monde, je voudrais que le monde soit meilleur, ce moment est épouvantable, je ne veux pas accepter cette chose horrible ». Alors vous prenez la fuite, vous fuyez ce moment. Que se passe t-il alors ? En vérité, dans la forme que prend ce moment, et celle ci change continuellement, il y a l’espace du maintenant dans laquelle la forme apparaît, puis elle disparaît, mais en réalité elle demeure en tant qu’espace du maintenant. La forme s’étant évanouie, le mental projette le passé pour intégrer ce qui vient d’arriver, mais en réalité tout se passe dans l’espace du maintenant. Tout survient dans le maintenant, puis tout se modifie. Tout survient continuellement dans l’espace du maintenant. Il n’y a donc qu’un seul moment, qu’un seul maintenant, il ne vous quitte jamais, pas plusieurs moments, mais il y a plusieurs formes que ce moment peut prendre. Et quelque soit la forme que prend ce moment, quoi qu’il arrive, il ne s’agit pas d’un événement séparé, car il n’y a pas d’événements séparé.

Nous savons grâce aux enseignements traditionnels et à la physique moderne, que tout est interconnecté, et qu’il n’y a pas d’entité ou d’événements séparés. Et cela veut dire que ce qui apparaît dans le maintenant, ce qui se passe dans le maintenant, est une expression de la totalité, et cela signifie qu’il ne pourrait en être autrement. Le cosmos dans sa totalité a généré cela. D’où le caractère inévitable de la forme que ce moment peut prendre. Quand vous reconnaissez le caractère inéluctable de ce qui est, vous voyez alors la folie d’y résister. Car cette résistance ne fait que renforcer cette entité « moi ». Elle renforce cette illusion. C’est pourquoi le petit moi aime faire du maintenant son ennemi.

Et quand vous prenez conscience de cela, alors s’offre à vous la possibilité de vivre différemment. Et intérieurement, vous vous accordez au maintenant. Cela veut dire que vous permettez à ce moment d’être tel qu’il est. Le Bouddha a utilisé le mot « suchness », c’est à dire le fait que les choses sont telles quelles sont. Et le petit moi de dire « non, rien ne changera jamais, et vous resterez coincé dans cet insupportable maintenant pour le restant de vos jours ». Mais il ne se rend pas compte qu’il a été coincé dans ses propres schémas mentaux toute sa vie. Quand vous permettez à ce moment d’être, vous lui dites oui, oui, ce oui signifie la fin de millier d’années de conditionnements collectifs. Le non au maintenant, la réaction, le non qui réagit à ce moment, à la forme que prend ce moment, renforce la forme psychologique du moi.

Mais avec un oui, quelque soit la forme que prenne la situation, si vous lui apportez un oui, alors quelque chose d’étrange se produit. Vous pouvez dire que soudainement un espace se forme autour de ce qui arrive. Et l’espace intérieur émerge également, un sentiment de vastitude. Et ceci est l’émergence de la conscience inconditionnée. Et il y a une immense intelligence au sein de cette conscience inconditionnée. La conscience conditionnée, c’est le mental humain, qui n’est qu’un aspect partiel de cette immense intelligence « Une ».

Donc quelque chose arrive, cela peut-être un défi qui survient à un moment donné de votre vie. La vie fait cela parfois. Cela se produit dans le champ du maintenant auquel vous ne résistez pas, mais à qui vous lui accordez simplement votre attention. Vous regardez cela. Cela apparaît et vous lui donnez simplement un flot continu d’attentions. Vous regardez. Et ceci est un changement énorme, la capacité à être simplement là, avec ce qui est dans cet état de vive attention. Et dans cet état de vive attention, une immense intelligence est à l’oeuvre. Et si l’action est nécessaire, elle se produira et elle résultera non pas d’une résistance, mais de cette intelligence qui n’est rien d’autre que cet état de présence consciente. Il arrive souvent aussi qu’un facteur extérieur surgisse soudainement, ce que requiert une situation donnée. Par exemple un événement simultané. Etant maintenant connecté à cette intelligence une, qui n’est pas limitée à votre cerveau, vous pouvez donc maintenant accueillir la vie dans cet état d’ouverture quoiqu’il arrive, même si en surface les choses paraissent mauvaises. Il ne peut en être autrement, on ne peut pas discuter avec ce qui est, donc autant l’accueillir à bras ouverts.

Mais, me direz-vous, n’y a t-il pas dans la vie des situations épouvantables, des injustices, des violences, des gens commettant des choses atroces envers les autres…. Etes-vous en train de me demander de ne rien faire ? Observez ce qui se passe. Vous êtes là en tant qu’espace de l’intelligence inconditionnée. Mettez vous dans une situation, non pas en tant que petite entité combative peureuse, en colère et qui voudrait créer un monde meilleur à partir de sa colère. Voyez par vous même qu’un monde véritablement transformé ne peut naître que d’un état de conscience transformé. C’est tout ce que nous avons besoin de réaliser, comme je l’ai déjà souligné plus tôt, la possibilité d’accueillir tout ce qui se passe maintenant dans un état de « oui ».

Et soudainement le portail s’ouvre, laissant l’intelligence inconditionnée s’exprimer à travers vous et commencer à opérer dans votre vie. Vous êtes alors vécu par la vie. Alors vous pouvez vous promener, observer les choses, les laisser être totalement, que la compulsion de les cataloguer mentalement n’est plus là. Vous n’êtes donc plus coincé par les étiquettes, les concepts, les pensées. C’est cela, s’éveiller du rêve de la pensée. Cela ne veut pas dire que la pensée ne se produit plus, mais elle n’est reconnue comme n’étant que pensée. Vous la voyez pour ce qu’elle est ? Le fait de voir, c’est la conscience inconditionnée. Ici nous ne pouvons que la désigner, au travers des mots, mais le véritable enseignement est de percevoir l’espace à partir duquel naissent les mots. Certains d’entre vous ont étudié le zen…. de quoi cela parle t-il ? De ceci, du refus sans compromis de quitter «  maintenant », sauf pour des questions pratiques : nous nous rencontrerons demain à telle heure ? OK ! Retour à maintenant, maintenant.

Si on demande aux maîtres zen quel est le sens du zen, certains vous frappent, d’autres vous donnent des explications absurdes, mais … Il y avait un maître qui était devenu célèbre, car tout ce qu’il faisait, était de lever le doigt quand on lui demandait « Pouvez-vous nous expliquer le zen s’il vous plait ? » « Oui » (en levant le doigt… puis long silence).

Maintenant le dernier secret, le secret de maintenant, c’est de sentir ce maintenant directement, non pas en tant que ce qui s’y passe, mais en tant que le champ sous-jacent. Et alors vous réalisez que le « maintenant » n’est pas vraiment séparé de ce que vous êtes, parce que vous êtes ce champ de présence consciente. Différentes personnes ont utilisé différents mots pour le dire : c’est simplement « l’êtreté », la présence : je suis, mais je ne suis plus ceci ou cela. Quelque part dans la bible, Dieu se définit lui même quand on lui demande qui es-tu ? Quel est ton nom ? Dieu répond « je suis celui qui est, je suis cela que je suis ». Je suis, c’est l’essence de l’être.

Ainsi, votre identité n’est plus cette petite histoire, mais ce champ, cet espace. Donc votre pratique spirituelle consiste simplement à dire « oui » au maintenant. Et souvent le vieux « non » refera surface, la vague de résistance à ce qui est. Alors que faites-vous ? Vous remarquez cette vague de résistance et vous dîtes : Oh ! il y a un non. Et vous faîtes cela en tant qu’espace de la présence consciente. Néanmoins, vous vous souvenez quand même de vos rôles, et de votre passé. Ensuite vous devez continuellement vous ressaisir, quand vous vous retrouvez aspiré par les concepts, le moi conceptuel, et vous vous en rendez compte puisque vous devenez malheureux, et que vous souffrez, vous avez perdu le maintenant. Où est le maintenant ? Mon passé, mon avenir… ? Et tout d’un coup votre attention fait « psstt… oh… Il n’y a pas vraiment de problème ici, n’est-ce pas ? » Et puis vous vous perdez à nouveau, et un objet aspire votre attention. Donc il a un va et vient incessant, et de plus en plus vous marchez sur le fil étroit du « maintenant ». Magnifique !

Et là, nous retrouvons à nouveau le paradoxe du temps, je verrai certains d’entre vous dans ce qui ressemble à demain. Mais quand je serai avec vous ce ne sera pas demain... Bizarre non ?

Merci.

Eckhart Tolle, Extrait de la Conférence à Hambourg le 13 avril 2002

18 juillet 2012

Tout ce qu'on veut, c'est rêver

La raison pour laquelle nous ne sommes pas des êtres éveillés est la paresse (Tendzin fit cette découverte dans sa grotte et elle y voit l'un des écueils principaux). Il n'y a pas d'autre raison. On ne se donne pas la peine de revenir au présent parce qu'on est trop fascinés par tous les jeux de l'esprit. Si l'on réfléchit réellement à ce que représente le renoncement, on constate que cela ne consiste pas seulement à renoncer aux choses extérieures comme l'argent, la maison, la famille. ça, c'est facile. Renoncer, c'est abandonner notre bavardage intérieur, c'est-à-dire ces chères pensées que nous aimons tant, tous ces souvenirs, espoirs, rêves et fantasmes. Renoncer à tout cela et demeurer nu dans le présent sont le vrai renoncement.
Le problème de fond, c'est qu'on veut et ne veut pas l'Éveil. De petites parcelles de nous désirent l'Éveil et ces petites parties ne sont rien d'autre que l'ego qui pense que ce serait si bien, si confortable et si agréable. Mais de là à tout laisser pour y aller carrément..! On peut le faire en un instant, mais on ne le fait pas, parce qu'on est trop paresseux. La peur et la léthargie nous arrêtent. La grande inertie de l'esprit. Et la pratique est là. Quiconque est engagé dans la voie bouddhiste sait cela. Alors pourquoi ne parvient-on pas à l'Éveil ? Nous ne devons nous en prendre qu'à nous-mêmes. Nous restons dans le samsara parce que nous trouvons toujours des prétextes. Il faudrait que nous nous réveillions vraiment ! Toute la voie bouddhiste consiste à s'éveiller. Mais le désir de continuer à dormir est si fort. En dépit de toutes nos allégations de vouloir parvenir à l'Éveil afin d'aider les êtres, on ne le veut pas vraiment. On aime surtout rêver.

Un ermitage dans la neige (vu chez Ipapy)

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16 juillet 2012

Plus un instant à perdre

Celui qui parle de vivre au présent rencontre régulièrement une curieuse objection : "Je ne peux pas vivre dans le présent, je l’oublie immédiatement. Cela marche quelques minutes, puis c’est fini." De telles paroles montrent qu’on n’a pas encore compris de quoi il est question. On croit que, dans l’avenir, onéchouera à vivre au présent. Mais il s’agit du présent maintenant, tandis que j’écris et que je lis. Si nous remplissons l’instant d’une présence complète, notre journée voit sans cesse apparaître de nouveaux instants qui nous invitent et nous exhortent à être totalement présents. Ne pensons pas toujours à l’avenir quand nous parlons de la vie au présent. Chaque instant a un message qui doit être pris au sérieux.

Un moyen qui peut nous aider à vivre de plus en plus dans le présent, c’est, paradoxalement, de penser souvent à la mort. C’est une caractéristique de la mort de nous ramener au présent... Dans un article sur la relaxation quelqu’undonnait le conseil de s’imaginer qu’on allait mourir le jour même. Un lecteur écrivait quelques semaines plus tard : “ Cela a bien marché : j’ai travaillé comme si tout devait prendre fin le soir même. J’ai laissé de côté des choses moins urgentes pour me donner totalement aux choses importantes.”

Méditation chrétienne profonde, de Wilfrid Stinissen

14 juillet 2012

Abondance

Reconnaître tout le bien qui vous arrive dans la vie est ce qui sert de fondement à l’abondance. En fait, tout ce que vous estimez que le monde retient et ne vous donne pas, c’est exactement ce que vous retenez et ne donnez pas . Vous le retenez parce que, profondément, vous pensez que vous êtes petit et que vous n’avez rien à donner.
Essayez de faire l’exercice suivant pendant une semaine ou deux et observez de quelle façon il change votre réalité. Quoi que ce soit que vous pensiez que les gens retiennent et ne vous donnent pas (louanges, appréciation, aide, amour, bienveillance, etc), donnez le leur. Vous ne l’avez pas ? Faites comme si vous l’aviez et cela viendra. Alors, dés que vous commencerez à donner, vous commencerez aussi à recevoir. Vous ne pouvez pas recevoir ce que vous ne donnez pas. Ce qui entre et le pendant de ce qui sort. Ce que vous pensez que le monde retient et ne vous donne pas, vous l’avez déjà. Si vous ne le laissez pas sortir, vous ne saurez même pas que vous le possédez. Ceci comprend aussi l’abondance. La loi qui veut que ce qui entre soit le pendant de ce qui sort est exprimé par Jésus dans cette image puissante : « Donnez, et l’on vous donnera, on versera dans le pan de votre vêtement une bonne mesure bien tassée, secouée et débordante ; car on emploiera, à votre égard, la mesure dont vous vous serez servi pour mesurer.
La source de toute abondance ne se trouve pas à l’extérieur de vous, elle fait partie de ce que vous êtes. Commencez cependant par reconnaître l’abondance à l’extérieur de vous. Voyez la plénitude la vie, la chaleur du soleil sur votre peau, les magnifiques fleurs dans la vitrine du fleuriste, le fruit succulent dans lequel vous mordez ou l’abondante pluie qui tombe du ciel et vous trempe. La plénitude de la vie est dans tout. Quand vous reconnaissez l’abondance qui est tout autour de vous, l’abondance latente en vous s’éveille. Laissez là alors sortir.

Eckhart Tolle, Nouvelle Terre

7 juillet 2012

Albert a dit

Un être humain fait partie du tout que nous appelons "l'univers", une partie limitée dans le temps et dans l'espace. Il se perçoit, avec ses pensées et ses sentiments, comme quelque chose de distinct du reste, un genre d'illusion d'optique de la conscience. Cette illusion est une sorte de prison pour nous, car elle nous limite à nos désirs personnels et à ne chérir que quelques personnes qui nous sont proches. Notre tâche doit consister à nous libérer de cette prison en élargissant notre cercle de compassion de façon à y inclure toutes les créatures vivantes et toute la nature dans sa beauté.

Albert Einstein

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5 juillet 2012

conte court

Un soir, un vieil indien raconta à son petit-fils l’histoire de la bataille intérieure qui existe en chacun de nous. Il lui dit :
- Mon fils, il y a une bataille entre deux loups à l’intérieur de nous tous. L’un est le Mal, c’est la colère, l’envie, la jalousie, la tristesse, le regret, l’avidité, l’arrogance, la honte, le rejet, l’infériorité, le mensonge, la fierté, la supériorité, et l’égo. L’autre est le Bien, c’est la joie, la paix, l’amour, l’espoir, la sérénité, l’humilité, la gentillesse, la bienveillance, l’empathie, la générosité, la vérité, la compassion et la foi.
Le petit-fils songea à cette histoire pendant un instant et demanda :
- Grand père, lequel des deux loups va gagner ?
- Celui que tu nourriras, répondit le vieil homme.

1 juillet 2012

Bulle, envole-toi !

Don Juan : " Les sorciers disent que nous sommes dans une bulle. C'est une bulle à l'intérieur de laquelle on nous met dès la naissance. Au début, la bulle est ouverte, puis elle commence à se fermer, jusqu'à ce que nous soyons scellés en elle. Cette bulle, c'est notre perception. Nous vivons à l'intérieur de la bulle pendant toute notre vie. Et tout ce dont nous sommes témoins sur sesparois rondes correspond à notre propre reflet. La chose réfléchie est notre représentation du monde. Cette représentation est une description qu'on nous a faite dès notre naissance. C'est ainsi que toute notre attention a été captée par elle, et nous sommes devenus description; la description, à son tour, est devenue représentation. "

Carlos Castaneda, Histoires de pouvoir

1 juillet 2012

Sagesse indienne

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"Les Blancs se moquent de la terre, du daim ou de l'ours. Lorsque nous, Indiens, cherchons les racines, nous faisons de petits trous. Lorsque nous édifions nos tipis, nous faisons de petits trous. Nous n'utilisons que le bois mort.
L'homme blanc, lui, retourne le sol, abat les arbres, détruit tout. L'arbre dit « Arrête, je suis blessé, ne me fais pas mal ». Mais il l'abat et le débite. L'esprit de la terre le hait. Il arrache les arbres et les ébranle jusqu'à leurs racines. Il scie les arbres. Cela leur fait mal. Les Indiens ne font jamais de mal, alors que l'homme blanc démolit tout. Il fait exploser les rochers et les laisse épars sur le sol. La roche dit « Arrête, tu me fais mal ». Mais l'homme blanc n'y fait pas attention. Quand les Indiens utilisent les pierres, ils les prennent petites et rondes pour y faire leur feu... Comment l'esprit de la terre pourrait-il aimer l'homme blanc?... Partout où il la touche, il y laisse une plaie."

Vieille sage Wintu (Indiens de Californie)

 

"Vous êtes déjà si misérables que vous ne pouvez le devenir plus. Quels genre d'homme doivent être les Européens? Quelle espèce de créature choisissent-ils d'être, forcés de faire le bien et n'ayant pour éviter le mal d'autre inspiration que la peur de la punition? (...) L'homme n'est pas seulement celui qui marche debout sur ses jambes, qui sait la lecture et l'écriture et montrer mille exemples de son industrie...
En vérité mon cher frère, je te plains du plus profond de mon âme. Suis mon conseil et devient Huron. Je vois clairement la profonde différence entre ma condition et la tienne. Je suis le maître de ma condition. Je suis le maître de mon corps, j'ai l'entière disposition de moi-même, je fais ce qui me plaît, je suis le premier et le dernier de ma nation, je ne crains absolument aucun homme, je dépends seulement du Grand Esprit.
Il n'en est pas de même pour toi. Ton corps aussi bien que ton âme sont condamnés à dépendre de ton grand capitaine, ton vice-roi dispose de toi. Tu n'as pas la liberté de faire ce que tu as dans l'esprit. Tu as peur des voleurs, des assassins, des faux-témoins, etc. Et tu dépends d'une infinité de personne dont la place est située au-dessus de la tienne. N'est-ce pas vrai ?"

Kondiarionk, chef Huron, s'adressant au baron de Lahontan, lieutenant français en Terre-Neuve

 

"Les hommes blancs annonçaient bien haut que leurs lois étaient faites pour tout le monde, mais il devint tout de suite clair que, tout en espérant nous les faire adopter, ils ne se gênaient pas pour les briser eux-mêmes.
Leurs sages nous conseillaient d'adopter leur religion mais nous découvrîmes vite qu'il en existant un grand nombre. Nous ne pouvions les comprendre, et deux hommes blancs étaient rarement d'accord sur celle qu'il fallait prendre. Cela nous gêna beaucoup jusqu'au jour où nous comprîmes que l'homme blanc ne prenait pas plus sa religion au sérieux que ses lois. Ils les gardait à portée de la main, comme des instruments, pour les employer à sa guise dans ses rapports avec les étrangers."

Pachgantschilhilas, chef des Delawares

 

"Enfant, je savais donner. J'ai perdu cette grâce en devenant civilisé. Je menais une existence naturelle, alors qu'aujourd'hui je vis de l'artificiel. Le moindre joli caillou avait de la valeur à mes yeux. Chaque arbre était un objet de respect. Aujourd'hui, j'admire avec l'homme blanc un paysage peint dont la valeur est exprimée en dollars !"

Chiyesa, écrivain indien contemporain

 

"Je suis allé à l'école des hommes blancs. J'y ai appris à lire leurs livres de classe, les journaux et la bible. Mais j'ai découvert à temps que cela n'était pas suffisant. Les peuples civilisés dépendent beaucoup trop de la page imprimée. Je me tournai vers le livre du Grand Esprit qui est l'ensemble de sa création. Vous pouvez lire une grande partie de ce livre en étudiant la nature.
Si vous preniez tous vos livres et les étendez sous le soleil, en laissant pendant quelque temps la pluie, la neige et les insectes accomplir leur oeuvre, il n'en restera plus rien. Mais le Grand Esprit nous a fourni la possibilité, à vous et à moi, d'étudier à l'université de la nature les forêts, les rivières, les montagnes, et les animaux dont nous faisons partie."

Tatanga Mani (ou Walking Buffalo), indien Stoney (Canada)

 

Extraits du livre de T.C.Mac Luhan, "Pieds nus sur la terre sacrée", une anthologie de la philosophie, du mode de vie et de la destinée des Indiens d'Amérique du Nord.
http://www.syti.net/MessageIndiens.html

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17 juin 2012

Amour toujours

20 mai 2012

Revenir chez soi

Vous vous promenez à la campagne un dimanche matin. C'est beau. Il y a des fleurs. Et vous prenez conscience, tout à coup, que depuis dix minutes, vous n'avez rien vu, rien senti, rien entendu. Vous étiez complètement absorbée par votre discours intérieur. Vous étiez « ailleurs ». Dans le futur, dans le passé, dans vos histoires avec Pierre, Jean, Jacques. Si vous revenez ici et maintenant, vous prenez soudain conscience de la caresse du vent sur votre peau, vous entendez de nouveau les enfants crier au loin, vous prenez de nouveau conscience du jaune et de l'orange des fleurs dans le champ. La pensée a pour fonction de nous amener dans le passé et le futur. Pour le corps, il n'y a ni passé ni futur. Il y a seulement ce qui se passe dans l'instant. Nous ne sommes jamais tout à fait là. Nos pensées, disent les Orientaux, nous hypnotisent. Elles sont comme un voile devant nos yeux, un écran de fumée qui encrasse les fenêtres de nos sens. Nous substituons continuellement la pensée à l'expérience directe. Dans les cultures orientales, ce discours intérieur incessant et quasi permanent constitue le principal obstacle à la connaissance et à La réalisation de soi-même. « Perdez la tête et retrouvez vos sens » est devenu, au cours des années le leitmotiv des nouvelles approches en psychologie. On rejoint par là un des éléments essentiels de la sagesse zen.

Méditer n'est pas non plus réfléchir à quelque chose. Au contraire, l'essentiel de la méditation consiste à ne plus penser du tout, à laisser le silence s'installer en soi. En fait, méditer n'est pas à proprement parler un acte. C'est plutôt un état. Une façon d'être.
On a toujours l'esprit occupé. On finit par être si habitués à l'agitation de notre esprit, au trafic incessant de nos pensées, qu'on finit par croire que ces pensées sont l'essence même de notre moi. On a fini par oublier que notre nature de base en est une de silence intérieur et que lorsque nous touchons des plages de ce silence, nous pouvons toucher du même coup l'extase d'exister tout simplement.
Les préjugés sur la méditation sont nombreux. On voit en la méditation un acte exotique, compliqué, alors qu'on peut méditer en mangeant, en marchant, en faisant la vaisselle. « Quand je mange, je mange ; quand je bois, je bois ; quand je dors, je dors », dit te maître zen à son disciple qui lui demande le secret de sa paix intérieure. « Simplement ça ? », dit le disciple déçu. Facile ? Essayez donc de manger pendant plus dune minute sans penser à autre chose...

Le grand mythologue américain Joseph Campbell montrait du doigt l'ampoule du plafond à ses étudiants et leur demandait : « Êtes-vous l'ampoule ou la lumière qui passe à travers l'ampoule ? » Il considérait la réponse à cette question essentielle. Qui suis-je ? Suis-je la lampe ou la flamme à l'intérieur de la lampe ? Ou suis-je les deux ?
Les sages, les saints et les êtres éveillés de différentes cultures nous répètent constamment que nous sommes la lumière qui passe à travers l'ampoule, alors que nous nous tuons à nous identifier à l'ampoule et que nous refusons de croire que nous pouvons être aussi la lumière. Méditer, c'est commencer à réaliser que si notre corps est l'ampoule qui contient la lumière, notre conscience, elle, est cette lumière qui circule indépendamment des courts-circuits ou des bris de verre. Nous sommes beaucoup plus vastes que ce que nous croyons.
Un soufi (ascète de l'Islam) qui toute sa vie s'est prosterné devant son Dieu, a, sur ses derniers jours, le « flash », la révélation : « Je suis celui que j'adore ».
Pour bon nombre de traditions orientales, il n'y a pas de Dieu extérieur à nous-même. Il n'y a, disions-nous, que des êtres réalisés, « éveillés », et d'autres qui ne le sont pas. Nous sommes tous des Bouddhas non arrivés à terme.
Le Bouddha en moi ressemble en certains points à un chat ou à un bébé. Merveilleux bébés d'avant la culture ! Observez-les : entiers, curieux, présents totalement ici et maintenant. C'est le sens du « redevenez comme des enfants » du Christ et, encore une fois, de la plupart des traditions mystiques. Non pas « Retombez en enfance », non pas « Redevenez infantiles », mais retrouvez en toute conscience la pureté, la curiosité animale, la totalité des tout-petits. Le tao a une superbe image qui résume bien la maturité consciente du vieillard et la spontanéité radicale de l'enfant : celle du vieil enfant. Devenez le vieil enfant. Retrouvez l'expérience directe d'un enfant découvrant le monde. Voyez, sentez, touchez, goûtez comme si c'était la première et la dernière fois. Cultivez la sagesse du vieillard qui a vu mille fois l'eau couler sous le pont, et qui sait d'expérience que tout change, et l'innocence de l'enfant qui sait voir un trésor dans une goutte d'eau.

Une des premières découvertes du méditant consiste à mettre en lumière tout le fonctionnement interne de la formation des pensées et des images. Pas de façon intellectuelle, mais par la simple auto-observation. Avez-vous déjà observé comment se forme une pensée ? D'abord, elle est vague, lointaine. Puis elle se précise peu à peu et envahit tout votre champ mental. Puis elle redevient de nouveau imprécise et disparaît. Même processus pour les émotions et les sensations. Elles émergent, éclatent et disparaissent comme des fleurs.
Méditer, c'est apprendre à voir les événements de votre vie pour ce qu'ils sont : des nuages passagers.
Vous êtes le ciel. Pensées, émotions, sensations, toutes les choses qui vous arrivent sont des nuages. Parfois les nuages sont noirs, parfois les nuages sont blancs, parfois ils s'accumulent jusqu'à masquer le ciel, parfois ils passent rapidement. Ils vont, ils viennent. Peu importe leur nombre, leur couleur, le temps qu'ils restent, ils ne sont que des nuages. Et vous, le ciel, vous demeurez inchangé.

Méditer, c'est aussi prendre contact avec ce qui en vous ne change pas. Les soufis nomment cela l'état d'hôte. Il y a l'hôte (vous) et il y a les invités (les pensées, les émotions, les sensations). Ne confondez pas l'hôte et les invités. Ne vous identifiez pas aux invités. Ils ne sont pas faits pour rester. C'est dans ce sens que bon nombre de traditions mystiques parlent de détachement. Il y a vous, et il y a la tristesse qui maintenant passe en vous. N'accrochez pas. La tristesse n'est que l'invitée qui passe dans l'auberge. Tôt ou tard elle sen ira. Seul l'hôte demeure.

Méditer, c'est commencer à s'aimer et à s'accepter sans se juger. Nous nous jugeons continuellement. Et le jugement nous fait sortir automatiquement de l'état méditatif. Le jugement requiert une comparaison constante du passé et du présent. Il nous ramène tout de go dans nos pensées. Il est peut-être nécessaire pour vivre en société, mais quand on revient à l'intérieur de soi, il devient une barrière, un obstacle. Quand on se juge, on s'empêche d'être comme on est. Plus vous prenez vos sentiments pour ce qu'ils sont (des nuages, des invités), plus vous vous regardez avec une sorte de bienveillance souriante. Tout passe. Et vous le savez. Vous vous permettez de plus en plus d'être totalement ce que vous êtes.

Méditer, ce n'est rien d'autre que revenir chez soi. En fait, il n'y a rien à faire dans la méditation. Ce n'est pas réciter un mantra, ce n'est pas faire une prière. Tout cela, c'est la technique qui ne fait que préparer la chambre pour recevoir l'invité. Méditer est simplement revenir chez soi et prendre un peu de repos. Il n'y a pas un « autre part» où aller dans la méditation. Il s'agit seulement d'être là où vous êtes, d'occuper tout l'espace où vous êtes. C'est ça, méditer.

Paule Lebrun Magazine Lumière - mars 1999

16 mai 2012

à côté de la vie

Souvent, nous passons à côté de nos vies.
Si souvent, il nous arrive de ne pas être dans ce qu’on fait ! D’être à côté …
À côté de nos bonheurs. Tous ces dimanches où on pense au lundi et où on ne profite pas du repos et de ses proches. Puis ces lundis où l’on regrette de ne pas avoir savouré son repos, et où du coup on n’est pas disponible pour ce qu’on a à faire ; alors on le fait avec difficulté et sans plaisir. Ce qui entraîne des retards, des complications, du déplaisir, et de nouveaux états d’âme désagréables.
À côté des petites choses pas importantes. Toutes les fois où on n’écoute pas ce qu’on nous dit, où l’on est absent, ailleurs. Toutes les fois où l’on ne sait plus où on a rangé quelque chose. Toutes les fois où on est allé quelque part sans y penser, en « pilotage automatique », On arrive et on s’aperçoit qu’on a marché ou conduit dans un état second, dans un autre univers : pas dans la réalité mais dans nos états d’âme.
À côté des moments importants. Combien de mariages, de cérémonies, de « grands moments » traversés dans un état second, où on se focalise sur tout sauf sur l’essentiel : l’instant présent. Parce que notre esprit est encombré de tant de choses et de soucis que l’on n’est capable ni de contrôler ni d’écarter.
Par moments, c’est presque toute notre vie qui prend l’habitude de s’écouler comme ça, hors de nous, à côté de nous, devant nous. Et nous suivons en trottinant derrière, en essayant de ramasser les morceaux, et d’en faire une construction cohérente après coup, en recollant souvenirs, photos, et réflexions éparses. Nous sommes victimes de la rémanence : l’instant d’avant dévore l’instant présent. Ou de l’anticipation et de l’inquiétude : l’instant d’après occupe nos pensées. L’instant présent n’existe plus : noyé dans le néant.
Mais passer à côté du présent, est-ce que ce n’est pas passer à côté de sa vie ?

Christophe André, Les états d’âme, un apprentissage de la sérénité

13 mai 2012

Mon nom est personne : les deux approches du Moi

Le bouddhisme et la psychanalyse avaient un point commun de taille : tous deux se penchaient sur l'étude approfondie du Moi. En allant au-delà des divergences, il était tentant de faire une jonction entre les deux courants. C'est le psychanalyste Jack Engler qui y parvint avec pertinence, grâce à un atout que ses pairs ne possédaient pas : il était aussi enseignant en méditation bouddhiste. Pour Engler, le bouddhisme et la psychanalyse se rejoignaient sur une affirmation aussi incontestable que révolutionnaire : le « moi » est une construction trompeuse. Le bouddhisme la désigne sous le terme de croyance de La personnalité, et le freudisme la nomme image internalisée. Cette notion complexe est fondamentale dans les deux courants ; aussi, elle mérite que nous prenions quelques lignes pour la simplifier.
Quand je dis « moi, je... », j'évoque en réalite une création virtuelle, fabriquée sur le socle des contacts avec le monde objectif. Au fil du temps et des expériences qui le façonnent, ce Moi se « convainc » d'être quelque chose de constant, de continu dans le temps, d'être une seule et même chose cohérente. Apparences que tout ceLa ! clament ensemble Freud et Bouddha. Oui, comme le dit la sagesse indienne, La personnalité n'est qu'une habitude bâtie sur la mémoire. De petites questions simples et amusantes illustrent ce paradoxe troublant. Si je regarde une photo de mon enfance, je dis aussitôt : « ça, c'est moi à 5 ans ! ». Or le moi que je suis à présent est fondamentalement différent de l'enfant que je fus jadis ! Mon apparence physique, ma personnalité et mon attitude d'adulte n'ont plus rien à voir avec celles de I'enfant qui exista. Les cellules, les atomes même qui me composent aujourd'hui ne sont définitivement plus ceux qui me constituaient autrefois ; d'autres les ont remplacés, et la matière organique qui m'animait joyeusement à 5 ans fait maintenant partie de la Nature, ou de quelqu'un d'autre !
De même, à partir de quel moment le milk-shake banane que je déguste dans un fast-food devient-il du moi ? Quand il est dans mon estomac ? Quand ses constituants sont assimilés par mes neurones ? Ou quand son glucose permet de fabriquer de la pensée dans mon cerveau ? Ces « différents messieurs dont je me compose » se jugeraient méconnaissables s'ils avaient à se rencontrer. Pourtant je les reconnais et je les accueille, sans discernement et sans conteste, au sein d'un seul et même moi. Parions que même si le destin m'amenait à perdre bras et jambes, je continuerai opiniatrement à me sentir autant « moi » qu' avant cette avanie.
Mais les deux courants s'opposent et rejoignent les craintes de Carl Gustav Jung. Un psychanalyste fit une synthèse lumineuse en soulignant la contradiction suivante. Brièvement, la psychanalyse soutient ceci : l'une des causes de la souffrance psychologique vient du manque de solidité de notre « moi ». A l'inverse, la psychologie bouddhique soutient que toutes nos souffrances viennent justement ce « moi », illusoire et trompeur. Aiors que les thérapies psychanalytiques tentent de restituer de la solidité au « moi », certains courants spirituels invitent à dissoudre ce même « moi »... Que choisir ? Après s'être demandé si ces deux théories se contredisaient ou pas, l'auteur termine par une formule percutante : « il faut d'abord être quelqu'un avant de pouvoir être personne ». La psychanalyse peut aider chacun à consolider son « moi », avant que la méditation n'amène à en dépasser les limites.

Dr Frédéric Rosenfeld :"Méditer c'est se soigner"

10 mai 2012

Quand je mange, je mange

Il y a bien longtemps, en Chine, un jeune moine demanda à son maître zen : « Qu’est-ce que l’éveil ? Comment est-ce pour vous ? » À quoi le maître répondit : Quand je mange, je mange. Quand je dors, je dors. »
On ne fait généralement guère attention à ce qu’on dit ou fait. On mange, sans vraiment manger ; on dort, sans vraiment dormir. Notre esprit est distrait, nos pensées partent dans tous les sens. On est souvent trop occupé à se lamenter sur le passé ou à s’y raccrocher, quand on n’est pas en train d’anticiper l’avenir ou de le redouter. Au lieu d’habiter pleinement son corps et de ressentir son vécu, on n’est qu’à demi conscients – dans les meilleurs cas. Pas complètement présents, à peine conscients. Pour preuve de ce triste état de choses, les bêtises et les aberrations qu’on commet en traversant l’existence comme en pilote automatique.
À force d’être si occupé et si pressé, on oublie de rester en contact avec ce qu’on est et ce qu’on fait. Si bien qu’on passe à côté de la beauté et de la tristesse, à côté de la réalité de sa vie, de sa texture particulière. On passe à côté de la vérité de ses expériences, d’instant en instant. Le manque de vigilance nous rend inattentif : on blesse les autres sans réfléchir, parfois même sans s’en apercevoir. Et l’on se fait soi-même du mal. On s’endort continuellement aux commandes de sa vie, risquant toutes sortes d’accidents physiques autant qu’affectifs.
Faute d’être pleinement conscients, on marche sur la fourmi, ou pire. On ne fait pas attention à son vécu dans l’immédiateté de l’instant présent et, quand enfin on lève le nez, on est déjà embarqué dans des relations personnelles désastreuses. Faute d’être attentif aux êtres qui nous sont chers, on se retrouve avec des enfants distants et des conjoints furieux. Le manque de vigilance et de conscience alerte a des répercussions dans tous les domaines, depuis les clés qu’on égare jusqu’aux vies qui dérapent. Conscience du présent et vigilance signifient savoir ce qu’on fait et ce qu’on dit. Contrairement aux apparences, il n’est pas facile de vivre pleinement le moment présent. Pas plus que de maintenir une conscience lucide et de rester vigilant.

Lama Surya Das, Éveillez le Bouddha qui est en vous

28 avril 2012

Voir l'ordinaire

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Gas (Station service) par Edward Hopper (1882-1967)

Tu passais, et tu t'es arrêté : il y avait quelque chose de particulier. La lumière, peut-être, à ce moment de la journée où viennent les ombres de la nuit et où les lueurs électriques créent lentement des îlots d'humanité dans la noirceur ? Ou bien la douceur de l'air ? Ou la masse sombre de la forêt alentour ?
Tu remarques ce détail, tout bête, du Pégase sur le panneau éclairé. Ce grand Pégase rouge avec ses trois petits frères piaffant d'impatience de s'élancer dans le ciel, vers le néant de la nuit. Cette effigie de Pégase comme une ancre étrange ton attention. Et te voilà présent à tout le reste de cet instant banal et ordinaire. Tu prends conscience des vapeurs d'essence, de la mélodie usée et gentiment débile qui sort d'une radio allumée quelque part dans la maison éclairée. Ce ne sont ni la beauté ni la bizarrerie de cet instant qui te touchent et t'immobilisent corps et âme. Tu n'as pas besoin de ça, beauté ou bizarrerie, pour arrêter le flots de tes pensées, de tes gestes et de tes projets. Tu t'es arrêté parce que cet instant est unique. Parce que tu ne reverras plus jamais exactement ce que tu vois. Parce que tu ne revivras plus jamais exactement ce que tu vis. C'est ça, tu as compris : tu t'es arrêté parce qu'à surgi à ta conscience l'essentiel. Tu es en train de vivre un bout de vie. Comment peux-tu oublier ça si souvent ? Oublier que vivre est une chance, oublier que chaque instant de vie est un miracle. Gagné sur la nuit, sur la mort, sur le néant. Comment peux-tu oublier ça ? N'oublie plus jamais de vivre. Maintenant, par exemple : relève la tête et regarde autour de toi avec les yeux d'un nouveau né, comme si jamais encore tu n'avais vu ce que tu vois.

Christophe André, Méditer, jour après jour - 25 leçons pour vivre en pleine conscience

18 avril 2012

impermanence

"Toutes ces joies, toutes ces peines sont comme de continuels dessins sur l'eau. Pourquoi courir après elles ? S'il vous faut absolument penser à quelque chose, examinez de quelle manière tout ce qui est réuni se disperse et tout ce qui est accompli se défait".

Guialtsé Thogmé Zangpo

17 avril 2012

vacuité

Imaginons une vague à la surface de la mer. Vue sous un certain angle, elle semble avoir une existence distincte, un début et une fin, une naissance et une mort. Perçue sous un autre angle, la vague n'existe pas réellement en elle-même, elle est seulement le comportement de l'eau, "vide" d'une identité séparée mais "pleine" d'eau. Si nous réfléchissons sérieusement à la vague, nous en venons à réaliser que c'est un phénomène rendu temporairement possible par le vent et l'eau, qui dépend d'un ensemble de circonstances en constante fluctuation. Nous apercevons également que chaque vague est reliée à toutes les autres. Si nous y regardons de près, rien ne possède d'existence intrinsèque. C'est cette absence d'existence indépendante que nous appelons "vacuité".
En pratiquant dans le but de réaliser la vacuité, il faut faire attention à ne pas tomber dansl'éternalisme- rien n'existe alors je peux tout faire. Une compréhension de l'impermanence permet de ne pas tomber dans l'éternalisme.
Aussi, Il faut éviter le nihilisme et ne rien faire du tout - si rien n'existe alors pourquoi chercher. En soit, les objets qui se manifestent devant nous existent mais seulement dans notre mental, par le biais de nos sens. En finalité, ils n'ont pas d'existence, mais dans la réalité courante (celle de notre mental), ils existent. Nous ne sommes pas encore des bouddhas (êtres éveillés) et devons êtres soumis à notre mental.

http://www.renaissance65.fr/la_vacuite.html

16 avril 2012

Socrate (400 avant JC)

« Connais-toi toi même. »

« Nos jeunes aiment le luxe, ont de mauvaises manières, se moquent de l’autorité et n’ont aucun respect pour l’âge. À notre époque, les enfants sont des tyrans.  »

« Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien.  »

« Je ne suis ni Athénien, ni Grec, mais un citoyen du monde.  »

« Ceux qui désirent le moins de choses sont les plus près des dieux.  »

« La sagesse commence dans l’émerveillement.  »

socrate

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